The Project Gutenberg EBook of Mythes chaldeens, by Leon Heuzey (1831-1922) This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.net Title: Mythes chaldeens Author: Leon Heuzey (1831-1922) Release Date: August 27, 2004 [EBook #13299] Language: French Character set encoding: ASCII *** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK MYTHES CHALDEENS *** Produced by Zoran Stefanovic, Mireille Harmelin and Distributed Proofreaders Europe. This file was produced from images generously made available by the Bibliotheque nationale de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr. REVUE ARCHEOLOGIQUE PUBLIEE SOUS LA DIRECTION DE MM. ALEX. BERTRAND ET G. PERROT, MEMBRES DE L'INSTITUT * * * * * MYTHES CHALDEENS par LEON HEUZEY 1895 PARIS, ERNEST LEROUX EDITEUR, 28 RUE BONAPARTE. * * * * * _N.B._--Tout ce qui est relatif a la redaction doit etre adresse a M. Alexandre BERTRAND, de l'Institut, au Musee de Saint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise), ou a M. G. PERROT, de l'Institut, rue d'Ulm, 45, a Paris. Les livres dont on desire qu'il soit rendu compte devront etre deposes au bureau de la _Revue_, 28, rue Bonaparte, a Paris. L'Administration et le Bureau de la REVUE ARCHEOLOGIQUE sont a la LIBRAIRIE ERNEST LEROUX, 28, rue Bonaparte, Paris. CONDITIONS DE L'ABONNEMENT: La _Revue Archeologique_ parait par fascicules mensuels de 64 a 80 pages grand in-8, qui forment a la fin de l'annee deux volumes ornes de 24 planches et de nombreuses gravures intercalees dans le texte. PRIX: Pour Paris. Un an. 30 fr. Un numero mensuel. 3 fr. Pour les departements. Un an. 32 fr. Pour l'Etranger. Un an. 33 fr. On s'abonne egalement chez tous les libraires des Departements et de l'Etranger. * * * * * MYTHES CHALDEENS Parmi les dieux chaldeens, representes en grand nombre sur les cylindres, la plupart restent encore pour nous indetermines. C'est que l'art de l'ancienne Chaldee n'est pas parvenu a les douer d'une personnalite assez forte. S'il les distingue les uns des autres, ce n'est en effet ni par l'originalite du type physique ni meme d'ordinaire par les particularites du costume, mais seulement par quelques attributs, souvent incertains et difficiles a connaitre. Trois ou quatre figures divines tout au plus se detachent de la masse confuse, grace a un symbolisme plus hardi, qui leur donne un aspect fantastique et qui est de nature a frapper vivement l'imagination. De ce nombre est un dieu caracterise par deux gerbes de flammes ondoyantes, qui lui sortent du dos et des epaules et lui font comme des ailes de feu. L'etrange decor, au milieu duquel il se montre d'habitude, est bien fait aussi pour exciter notre curiosite. Le dieu, visible jusqu'aux genoux ou seulement jusqu'a la taille, apparait derriere une montagne dont le sommet se termine parfois en double pyramide. Au premier plan, en avant de cette scene, qui semble avoir l'horizon pour theatre, deux autres personnages ouvrent les battants d'une grande porte et servent, a l'occasion, d'introducteurs aux devots qui se presentent avec des offrandes. Quelques interpretes en ont conclu qu'il s'agissait simplement d'un temple du dieu et des portiers qui en surveillaient l'entree. D'autres, au contraire, sont alles chercher beaucoup trop loin des explications peu vraisemblables. Telle est surtout la singuliere hypothese qui, sous l'empire des preoccupations bibliques, voit dans ces monticules et dans la porte qui les precede une allusion a la tour de Babel, sur les ruines de laquelle se dresserait un dieu vengeur[1]. L'opinion plus diserte, qui a songe aux sept portes infernales, mentionnees dans la celebre legende d'Istar, n'est pas au fond plus acceptable: car il est impossible de faire du dieu aux ailes de flamme une divinite souterraine et, comme il a ete dit, le sinistre gardien du sejour d'ou l'on ne revient pas[2]. [Note 1: G, Smith, _Chaldaean account of Genesis_, p. 158.] [Note 2: Menant, _Cylindres de la Chaldee_, p. 125.] Je crois avoir etabli des 1884; dans les observations qui accompagnent mon memoire sur la Stele des Vautours, le veritable sens de la representation, en lui attribuant un caractere tout sideral[3]. Le dieu flamboyant qui parait derriere les montagnes ne peut etre qu'un astre, le soleil evidemment, l'astre brulant par excellence[4]. Les portes qui s'ouvrent devant lui sont les portes du ciel[5]; c'est la une image chere a toutes les mythologies primitives, en Grece comme en Chaldee. Le pieux Chaldeen qui invoquait le Soleil lui disait, le matin: Tu ouvres la porte du ciel, et lui repetait, le soir: Que la porte du ciel te soit obeissante. [Note 3: Dans la _Gazette archeologique_ de 1884, p. 198 200; article reimprime dans les _Origines orientales de l'art_, p. 76-78.] [Note 4: Designe ideographiquement par le signe _oud_, appele _Para_, _Babbar_ en sumerien, _Samas_ (ou si l'on veut _Shamash_) en langage semitique.] [Note 5: En sumerien _ghis-gal Anna-ghe_, Voir les hymnes au Soleil levant et au Soleil couchant, depuis longtemps traduits, le premier par F. Lenormant, _La Magie chez les Chaldeens_, p. 165-166, le second par O. Bertin dans la _Revue d'Assyriologie_, vol. I, IV, p. 157-161.] Quant aux gardiens de ces portes, coiffes ordinairement du bonnet a double corne, ce sont des divinites secondaires attachees au dieu principal, des genies du soir et du matin, de l'Orient et de l'Occident, analogues aux Heures grecques, malgre la difference des sexes, ou bien encore aux Dioscures. Ces idees sont d'ailleurs si simples, elles repondent si bien au sujet et viennent si naturellement a l'esprit que je ne saurais m'etonner de les voir aujourd'hui adoptees de differents cotes, comme l'explication courante de la curieuse representation gravee sur les cylindres[6]. [Note 6: Maspero, _Histoire ancienne des peuples d'Orient_, I, p. 655-658; W. Hayes Ward, _Seal Cylinders_ (catalogue des cylindres du Musee metropolitain de New-York), p. 13 et suiv., 18 et suiv.] Nous trouvons la juxtaposees, plutot que combinees, deux conceptions de l'imagination populaire, qui sont d'ordre different. L'image des portes du ciel est d'essence poetique; c'est purement une allegorie, une metaphore realisee par le dessin. L'autre scene au contraire, tout en donnant au soleil la forme humaine, divinisee par des attributs, le fait agir et se mouvoir dans le cadre reel de l'horizon et des montagnes; nous sommes devant un veritable paysage, resume en quelques traits, et le dieu reste en contact avec la nature. L'incoherence qui resulte d'un pareil doublement d'images est loin du reste de repugner a la poesie primitive; l'impression d'ensemble en devient plus fantastique, et ces portes, ouvertes sur le monde, prennent les proportions de l'infini. Meme chez les Chaldeens, c'est dans un premier anthropomorphisme, mele au sentiment de la nature, qu'il faut chercher, croyons-nous, l'explication de cette mythologie figuree, plutot que dans des constructions cosmologiques, trop precises, agencees et raccordees apres coup sous l'influence du dogmatisme sacerdotal. Comme exemple de ces representations, nous reproduisons d'abord un cylindre deja plusieurs fois publie[7], qui donne la mise en scene telle qu'elle est le plus souvent disposee (fig. 1). [Note 7: A. de Longperier, _Notice des antiquites assyriennes_, n deg. 540; Menant, _Cylindres de la Chaldee_, p. 123, fig. 71; Maspero, _Hist. anc. des peuples d'Orient_, p. 656.] A premiere vue, on pourrait douter si le soleil s'eleve ou descend derriere les montagnes. La question est resolue par certaines variantes, ou le dieu semble se hausser, en s'appuyant des deux mains sur la double cime[8]. Ici meme son bras gauche, replie avec effort, conserve quelque chose de la precedente attitude, comme pour rendre sensible aux yeux le mouvement ascensionnel de la figure. Le soleil a son lever avait, dans la superstition orientale, une puissance particulierement bienfaisante. C'etait l'heure ou il chassait les demons de la nuit et dissipait leurs malefices. Il ne faut pas oublier que les cylindres, tout en servant de cachets, etaient aussi des talismans; les images qu'ils imprimaient sur l'argile avaient une influence protectrice, une valeur de bon augure. On s'explique ainsi que la representation du soleil levant y soit figuree de preference. [Note 8: Menant, _Cylindres de la Chaldee_, p. 122, fig. 69; cf. pl. III, fig. 3.] [Illustration: Fig. 1.] Le dieu, a ce moment de son apparition, est toujours vetu d'une longue robe, et il eleve souvent de la main droite un attribut dont la forme et la nature sont ici nettement caracterisees: ce n'est ni une arme ni precisement un rameau, mais bien une palme[9]. Faut-il deja, dans le symbolisme chaldeen, en faire l'embleme classique de la victoire, exprimant le triomphe de la lumiere sur les tenebres? Il serait peut-etre plus simple d'y reconnaitre, a l'origine, l'attribut naturel du dieu qui protege les palmiers et qui en murit les fruits. Du reste, les deux interpretations ne s'excluent pas necessairement, et le geste a, sans contredit, quelque chose de triomphal. [Note 9: Sur les cylindre de petite dimension cette palme a ete facilement prise pour une arme, pour une sorte de coutelas (cf. fig. 2 et 6); c'est la une meprise qu'il faut rectifier.] Ce que je que voudrais surtout montrer, c'est que ce premier acte du drame solaire n'est pas le seul qui soit figure dans l'iconographie chaldeenne. Il y a la une action qui se poursuit et qui fait naitre en se developpant d'autres peripeties non moins expressives, qui mettent en scene de nouveaux acteurs. Le fait est demontre par quelques cylindres de la collection du Louvre, dont plusieurs sont d'acquisition recente. Un point plus avance de la marche du dieu est marque par les representations qui le font voir tout entier de profil, posant le pied sur la montagne ou sur l'un de ses sommets, quand elle est double. C'est la barriere de l'horizon definitivement franchie par le Soleil, qui s'apprete a bondir au dela. Dans cette attitude, la figure, encore vetue de son riche costume, tient toujours, avec un grand geste, la palme elevee devant elle. Un des cylindres du Louvre reproduit la scene avec plus de details qu'a l'ordinaire (fig. 2). La porte du ciel a ses battants surmontes de deux lions; entre les lieutenants du dieu, qui la tiennent grande ouverte, un adorateur s'approche timidement et presente un chevreau[10]. [Note 10: Variantes plus simples sur un autre cylindre du Louvre, cf. _Coll. De Clercq_, n deg. 85 et Menant, numeros 68 et 72.] [Illustration: Fig. 8.] Infiniment plus rares sont les representations ou le dieu Soleil s'empare d'une montagne, sans doute distincte de la precedente, non plus par simple escalade, mais en livrant bataille a un premier occupant, dieu comme lui. Le cylindre, dont nous reproduisons l'empreinte, donne un exemple remarquable et tout a fait dramatique de ce nouvel acte de la legende. Ici la porte du ciel n'est plus figuree; nous sommes a une autre etape dans la marche diurne de l'astre. Les deux acolytes divins, qui tout a l'heure jouaient le role de portiers, n'ont pas cependant abandonne leur chef; ils le suivent maintenant et font partie de son escorte guerriere, portant ses armes sacrees, une masse d'armes de rechange et le baton coude qui lance revient a la main. Le dieu lui-meme se montre dans un redoutable appareil de combat. Completement nu, la taille seule sanglee d'une etroite ceinture, tout environne de flammes, qui lui sortent meme des jambes, il aborde de pres son adversaire et le menace de sa masse d'armes. Apres lui, pour lui preter main forte, vient encore un terrible personnage, qui n'est caracterise par aucune arme ni par aucun attribut, si ce n'est qu'il brule et flamboie de la tete aux pieds; c'est l'incendie qui marche. Il ne faut pas hesiter, croyons-nous, a y reconnaitre le demon du feu ou mieux le Feu en personne[11], plus d'une fois celebre dans les hymnes de l'ancienne Chaldee. [Note 11: _Is_ ou _Ghi-bil_; voir particulierement les fragments d'hymnes deja rassembles par F. Lenormant, _La Magie chez les Chaldeens_, p. 169-173.] [Illustration: Fig. 3.] Quant au dieu menace d'etre brule vif, rien n'est plus curieux ni plus naivement expressif que son attitude. Assis sur la montagne, dont il etait jusque-la le paisible possesseur, nu comme son ennemi et n'ayant aussi qu'un lien autour de la taille, il est de plus tout a fait desarme contre cette irruption soudaine. Aussi se contente-t-il d'ecarter ses mains ouvertes et abaissees dans un geste d'impuissante protestation. Il semble cependant qu'il n'ait pas cede la place sans resistance; c'est ce qu'indiquent plusieurs cylindres de plus petite dimension[12], dont le Louvre possede un bon exemplaire. Au revers de la representation precedente, sommairement reproduite, on voit une scene de palestre ou les deux adversaires se mesurent corps a corps; mais deja le dieu de la montagne a flechi le genou et la victoire du Soleil n'est pas douteuse. Dans plusieurs variantes curieuses de la collection de Clercq, l'agresseur saisit son ennemi par sa longue barbe; souvent encore il tient sa masse d'armes et ne l'abandonne que vers la fin de la lutte[13]. [Note 12: Tous les cylindres ici figures sont reproduits a la grandeur reelle de l'execution.] [Note 13: _Catalogue de la Collection de Clercq_, pl. XIX, numeros 176, 180 et surtout 181; cf. 178. La presence des ailes de feu est significative et devrait bien faire abandonner une fois pour toutes l'ancienne explication des sacrifices humains par de pretendus pontifes.] [Illustration: Fig. 4.] Avant d'etudier la signification, d'ailleurs assez transparente, de cette lutte epique, je voudrais faire connaitre un cylindre du Louvre, qui donne une disposition un peu differente de la scene d'agression. Le travail soigne, minutieux, cherche a rendre jusqu'au fond rocheux du paysage, ce qui parait marquer une epoque assez avancee dans l'art chaldeen. Ici la montagne, beaucoup plus developpee dans ses lignes, brule tout entiere autour du dieu, qui n'est pas seulement assis, mais adosse contre ses hautes pentes. Bien que le Soleil n'ait pas ses ailes de feu, sans doute a cause du champ restreint qui l'entoure, il est designe par une torche a triple flamme dont il menace son adversaire, en meme temps qu'il le saisit par une des cornes de sa tiare. Les ailes flamboyantes ont passe a une deesse, peut-etre _Aa_ ou _Malka_, l'epouse meme du Soleil[14], tenant une couronne en signe de victoire. Les deux lieutenants ne sont pas figures, non plus que le demon du feu, a moins que l'on ne reconnaisse ce dernier dans un petit personnage qui est agenouille derriere la montagne et semble attiser l'incendie. [Note 14: Voir la fin de la page suivante.] [Illustration: Fig. 5.] Il est impossible de ne pas ouvrir une parenthese pour dire incidemment quelques mots de la seconde scene gravee sur le revers du meme cylindre. C'est encore une des luttes ou le dieu Soleil etait engage, d'apres la legende chaldeenne; mais celle-ci appartient a une autre partie de son histoire. Au milieu des montagnes, qui forment derriere les figures comme deux panneaux rocheux, le dieu aux ailes de feu, dont le caractere sideral est encore accentue par une etoile qui rayonne entre les cornes de sa coiffure, a trouve un nouvel adversaire dans Eabani, le monstre moitie-homme, aux jambes de taureau, vivant avec les betes sauvages. Les fragments conserves de l'epopee chaldeenne racontent bien en effet par quelles seductions le Soleil l'avait attire et retenu dans la ville d'Erech; mais ils ne parlent pas de violence. Ici c'est de force que le dieu lui-meme s'empare du monstre, l'arretant a la fois par sa queue de taureau et par l'une de ses cornes, sans craindre la massue recourbee dont il est arme. L'episode est de toute maniere inedit; seulement rien ne prouve qu'il se reliat en quelque facon a la lutte ignee contre le dieu de la montagne, et ce n'est peut-etre qu'un simple pendant a la scene gravee sur le cote oppose du cylindre. Revenons maintenant a cette lutte, qui fait surtout l'objet de notre etude. Prise en elle-meme, elle parait representer l'heure du jour ou les rayons solaires sont dans toute leur incandescence. La difficulte est de savoir quelle est la montagne, dont le dieu cherche alors a prendre possession en la brulant de ses feux. Est-ce la cime arrondie sous la forme de laquelle les Chaldeens se representaient la terre? Une idee plus simple peut-etre serait d'y reconnaitre la montagne de l'Occident[15], vers laquelle l'astre, arrive au sommet de sa course et maintenant dans toute sa force, marche pendant ces heures de l'apres-midi qui sont les plus chaudes de la journee. Les legendes chaldeennes, dont les debris nous sont parvenus, sont si incompletes qu'il serait vain de vouloir nommer le dieu qui se mesure ici avec le Soleil[16]. Il suffit de nous rappeler, par la comparaison avec d'autres mythologies, que de pareilles luttes, comme le combat d'Hercule et d'Apollon dans la legende grecque, sont inherentes a l'essence meme des mythes solaires. [Note 15: Cependant sur le cylindre n deg. 178 de la collection De Clercq, le vieillard nu, a longue barbe, est deja agenouille devant le dieu flamboyant au moment ou celui-ci met le pied sur la montagne. Peut-etre est-ce une representation abregee, qui reunit les deux scenes en une seule.] [Note 16: Les assyriologues mentionnent un dieu de l'Occident nomme _Martov_, fils d'Anou, le dieu du Ciel; F. Lenormant, _Les dieux de Babylone et de l'Assyrie_, p. 17.] J'ajouterai que la presence de l'epouse du Soleil est liee d'habitude au moment ou l'astre acheve sa course. C'est dans l'hymne chaldeen au Soleil couchant[17] qu'il est dit en propres termes: Que ton epouse bien-aimee vienne avec joie au devant de toi. [Note 17: Dans cet hymne bilingue (traduit par O. Bertin, _Revue d'Assyr._, I, IV, p. 158, le nom de la deesse, douteux en sumerien, se lit A-a dans la traduction assyrienne, comme sur un grand nombre de cylindres ou il est grave a cote de celui du Soleil (_Catal. de la Coll. de Clercq_, n deg. 172; cf. numeros 98, 117, 129 et 130). Pour l'identification avec _Malka_, voir dans le meme ouvrage la note de M. Oppert, p. 57.] Ainsi le poete grec Stesichore, dans un chant conserve par Athenee[18], rapportait de meme que le Soleil S'en allait dans les profondeurs de la nuit sacree, de la nuit solitaire, Pour retrouver sa mere et l'epouse de sa jeunesse, Et ses chers enfants. [Note 18: Athenee, I, p. 469, _e_.] Les points de contact entre les legendes grecques et celles de la Chaldee sont maintenant si bien etablis qu'il y a peut-etre la quelque chose de plus qu'une coincidence, d'ailleurs assez naturelle. [Illustration: Fig. 6.] Ce qui me confirme dans l'idee d'un assaut livre a la montagne de l'Occident, c'est un autre cylindre qui represente le combat termine et le dieu aux ailes de flamme se reposant apres sa victoire. Assis a son tour sur la montagne qu'il vient de conquerir, il tient encore en main la masse d'armes. Dans le champ, des deux cotes de la figure, sont suspendues une autre masse d'armes et une aiguiere ou un vase a verser, double symbole du repos apres la lutte. Ajoutez que les portes du ciel sont ici de nouveau representees avec leurs gardiens habituels. Telle est bien l'impression que produisent sur l'imagination populaire les splendeurs du soleil, quand il approche de son coucher. Le moment ou il semble se reposer a l'horizon est comme un triomphe ou se manifeste sa royaute. Les Grecs modernes, pour exprimer le fait que le soleil se couche, disent d'un seul mot qu'il "regne"[19], expression superbe qu'ils ne semblent pas devoir a l'antiquite classique. La representation gravee sur notre cylindre eveille une idee toute semblable. [Note 19: le mot grec correspondant, donne dans le texte de l'auteur, n'a pu etre reproduit ici.] [Illustration: Fig. 7.] Avec les scenes successives qui viennent d'etre decrites, nous aurions toute l'evolution diurne de l'astre. Cependant, avant de clore cette enumeration, Je voudrais signaler encore deux variantes interessantes, egalement tirees de nos cylindres chaldeens. Dans l'une d'elles, le dieu, au lieu de troner sur la montagne, est assis sur un siege ordinaire. La porte, comme il arrive quelquefois, est indiquee par un seul battant, que tient un des deux genies, tandis que l'autre introduit un adorant. On remarquera ce curieux detail que le presentateur deploie et agite une grande draperie, sorte de voile ou de rideau, qui pouvait bien etre l'offrande faite au dieu; mais l'idee qui s'y attachait etait evidemment de masquer, d'attenuer pour les yeux mortels le dangereux rayonnement de la face solaire. La representation suivante (fig. 8) rappelle de tres pres celle par ou nous avons commence, l'image du dieu paraissant a demi derriere la montagne; mais elle est d'un style particulier et elle offre des details qui ne sont pas ordinaires. [Illustration: Fig. 8.] On remarquera surtout que les six lignes ondulees figurant les ailes de flamme se terminent par autant d'etoiles. Si, contrairement a l'opinion opposee plus haut, la scene pouvait se rapporter, dans certains cas, au soleil descendant derriere l'horizon, aucune variante ne s'y preterait mieux que celle-ci. Comme dans un exemple precedent, les battants de la porte sont surmontes de deux lions. Les deux gardiens n'ont pas cette fois la coiffure munie de cornes; en revanche, ils sont armes de batons recourbes. Ces armes ne leur sont point inutiles; car ils ont a contenir un horrible demon, aux pieds d'aigle, a la tete decharnee, assez semblable a celui qui figure le Vent du sud-ouest dans plusieurs representations connues. Des traits presque effaces semblent indiquer des ailes et meme quelques flammes qui entourent le monstre. Ne serait-ce, sous une forme plus accentuee, que le demon du feu? Je prefererais y reconnaitre un de ces esprits mauvais que la montee du jour met en fuite et qui recommencent a roder sur la terre a l'approche du soir. Si reellement il y a des flammes autour de lui, on peut supposer qu'il paie ainsi sa temerite a braver les feux du soleil. A cote des compositions precedentes, qui apportent un developpement notable a l'iconographie des mythes solaires dans l'ancienne Chaldee, je ne resiste pas au desir de faire connaitre, pour terminer, un remarquable cylindre qui n'appartient plus a la meme serie et dont les figures nous conduisent dans un domaine mythologique different. L'idee de representer les dieux sur des animaux reels ou imaginaires est une des formes les plus originales du symbolisme chaldeo-assyrien. Cependant les groupes de ce genre, assez frequents a l'epoque assyrienne et aussi chez les populations de l'Asie Mineure, sont tout a fait rares sur les monuments de la haute antiquite chaldeenne. En voici pourtant un exemple, d'autant plus interessant que le procede n'est pas encore devenu banal et commun a toutes les divinites. [Illustration: Fig. 9.] Du meme pas s'avancent l'un derriere l'autre deux monstres exactement pareils, que l'on pourrait, par anticipation, appeler apocalyptiques. Lions par le corps, par leurs membres anterieurs et par leurs tetes abaissees, dont les terribles machoires, ouvertes en cisailles, vomissent des torrents d'eau ou de feu, ils sont aigles par leurs puissantes ailes etendues, par les serres de leurs pattes posterieures et par leur queue de plumes en eventail. C'est en somme une des formes que la demonologie chaldeo-assyrienne prete le plus souvent aux puissances destructives, aux esprits du mal. Seulement l'art chaldeen y ajoute une grandeur etrange, surtout par la petitesse relative des figures divines que ces monstres portent a travers l'espace, non pas simplement, comme plus tard, posees sur leur dos, mais dresses en avant sur le garrot de la bete, vers la naissance des ailes deployees, qui semblent les soulever. Sur le premier vient un dieu qui tient dans sa main droite l'arme coudee des rois chaldeens[20] et leve le bras gauche d'un geste menacant, comme s'il poussait un cri de guerre. La petite figure qui suit sur l'autre monstre est plus difficile a determiner, a cause de son exiguite meme; pourtant les formes generales et la robe serree aux jambes[21] sont bien d'une femme[22]; de ses mains etendues elle tient deux traits brises, qui font penser a des eclairs. Une figure virile, de proportions beaucoup plus grandes, marche entre les deux animaux; comme elle est a pied, on a pu lui laisser toute la hauteur du cylindre, sans qu'il faille lui accorder pour cela un rang superieur dans la hierarchie celeste. De meme que le dieu qui le precede, ce personnage porte l'arme coudee; mais, si l'on en juge par sa coiffure depourvue de cornes, il ne joue a sa suite que le role d'un simple _armiger_[23]. Pour une raison toute technique, tenant a la necessite de remplir le champ du cylindre, les dieux principaux ne sont pas ici designes par leur taille, mais par leurs redoutables montures. [Note 20: Si, comme je le suppose, cette massue coudee etait aussi une arme de jet, sorte de _boumerang_, elle represente tres exactement l'eclair et la foudre.] [Note 21: A moins que meme la figure ne soit nue.] [Note 22: Cette reserve est motivee par l'empatement du menton et du cou, d'ou il resulte une certaine indecision sur le sexe de la figure.] [Note 23: Le meme sujet, rudement ebauche a la pointe, se trouve deja sur un cylindre du Louvre, de travail plus archaique. L'acolyte y prend la forme d'un genie a quatre ailes.] De pareilles images appartiennent evidemment au cycle des divinites qui personnifiaient les troubles de l'atmosphere, comme _Bin_, ou mieux _Ramman_, le dieu des tempetes, avec sa compagne, la deesse _Sala_, et les autres etres mythologiques qui forment leur cortege[24]. Les monstres qui les portent figurent les ouragans, les souffles orageux, qui se confondent, dans les incantations chaldeennes, avec toute une classe de demons malfaisants. [Note 24: F. Lenormant, _Les dieux de Babylone_, p. 18; Sayce, _Religion of the ancient Babylonians_, p. 202 suiv.; Maspero, _Hist. anc. des peuples d'Orient_, p 661-663. Pour la deesse Sala, voir surtout les cylindres qui portent la legende "Ramman et Sala". De Clercq, _Catalogue_ n deg.24; cf. 204.] Par cet exemple, compare a ceux que nous avons empruntes aux representations solaires, on peut juger avec quelle puissance tragique et quelle fantaisie grandiose l'imagination des artistes chaldeens avait su dramatiser la marche des phenomenes celestes et l'eternel combat des forces de la nature. Leon HEUZEY FIN des MYTHES CHALDEENS * * * * * End of Project Gutenberg's Mythes chaldeens, by Leon Heuzey (1831-1922) *** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK MYTHES CHALDEENS *** ***** This file should be named 13299.txt or 13299.zip ***** This and all associated files of various formats will be found in: http://www.gutenberg.net/1/3/2/9/13299/ Produced by Zoran Stefanovic, Mireille Harmelin and Distributed Proofreaders Europe. This file was produced from images generously made available by the Bibliotheque nationale de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr. Updated editions will replace the previous one--the old editions will be renamed. Creating the works from public domain print editions means that no one owns a United States copyright in these works, so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the United States without permission and without paying copyright royalties. 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It exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from people in all walks of life. Volunteers and financial support to provide volunteers with the assistance they need, is critical to reaching Project Gutenberg-tm's goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will remain freely available for generations to come. In 2001, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4 and the Foundation web page at http://www.pglaf.org. Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit 501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by U.S. federal laws and your state's laws. The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S. Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered throughout numerous locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact information can be found at the Foundation's web site and official page at http://pglaf.org For additional contact information: Dr. Gregory B. Newby Chief Executive and Director gbnewby@pglaf.org Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide spread public support and donations to carry out its mission of increasing the number of public domain and licensed works that can be freely distributed in machine readable form accessible by the widest array of equipment including outdated equipment. Many small donations ($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt status with the IRS. The Foundation is committed to complying with the laws regulating charities and charitable donations in all 50 states of the United States. Compliance requirements are not uniform and it takes a considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up with these requirements. We do not solicit donations in locations where we have not received written confirmation of compliance. To SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any particular state visit http://pglaf.org While we cannot and do not solicit contributions from states where we have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition against accepting unsolicited donations from donors in such states who approach us with offers to donate. International donations are gratefully accepted, but we cannot make any statements concerning tax treatment of donations received from outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff. Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation methods and addresses. Donations are accepted in a number of other ways including including checks, online payments and credit card donations. To donate, please visit: http://pglaf.org/donate Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic works. Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be freely shared with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support. Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper edition. Most people start at our Web site which has the main PG search facility: http://www.gutenberg.net This Web site includes information about Project Gutenberg-tm, including how to make donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.